L’eau m’offre une vision

L’eau n’est pas seulement l’élixir de vie de notre planète. Elle est aussi mon guide vers l’avenir. Ses courants ressemblent aux forces de l’Histoire. Ils sculptent les vallées, relient les civilisations, créent le mouvement, le changement, la cohésion. Dans les océans, le plus petit rencontre le plus grand. De minuscules ciliés à membrane soyeuse dansent dans les tourbillons et trouvent leur chemin jusqu’aux fanons des baleines bleues. Dans le ciel, l’eau rejoint les montagnes. Elle fait pousser des arbres sur des rochers nus, s’unit aux glaciers, et fracture les montagnes.

C’est dans ce monde alpin que je me sens chez moi et que j’aime les cent visages de l’eau. Quand elle transforme un alpage en paysage lunaire scintillant, quand les gouttes d’un arc-en-ciel forment un toit au-dessus de la vallée.

Parfois, la colère et la déception m’envahissent face à toutes celles et ceux qui, inconsciemment – ou pire, sciemment – acceptent le risque que les deltas s’assèchent, que les poissons soient empoisonnés, que le réchauffement des océans détruise les récifs coralliens. Je me sens impuissante, car il y a tant d’endroits où il faudrait agir, et je ne vois pas comment nous pourrions tout accomplir.

Puis la pluie se met à tomber. Les gouttes me ramènent en montagne. Je regarde autour de moi, et la tristesse, les pensées sombres s’envolent. Les petites gouttes coulent de mes yeux, se rejoignent en rigoles et deviennent un ruisseau. La joie me gagne, car je vois ce filet d’eau tracer un nouveau chemin dans le sable.

Une nouvelle époque commence. Comme les gouttes ont une direction, l’eau me donne une vision. En 2050, j’espère que l’eau aura retrouvé sa diversité, que tout le monde ait accès à une eau potable, que les connaissances se multiplieront et que nous agirons en conséquence. Que nous sortions des schémas linéaires et que nous considérions la vie comme un cycle global.

Je sais que nous y arriverons. Aide-nous. Écoute l’eau. Accepte d’avoir parfois les pieds mouillés, d’avoir besoin d’un imperméable. Écoute quand des spécialistes parlent des « polluants éternels » ou de l’eutrophisation – et demande-leur ce que cela signifie.

Réfléchis à comment notre comportement en Suisse peut détruire – ou préserver – les récifs coralliens. Suis le courant, contourne les obstacles, mais trace aussi de nouveaux chemins. Je crois que si nous nous voyons comme faisant partie d’un cycle, la vie sera meilleure pour toutes et tous. Et si nous savons aussi nous effacer un peu, et laisser de la place à la nature, alors nous vivrons bien – et nos petits-enfants aussi.

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